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Bel-Ami / Милый друг - стр. 71

Elle était tranquille et gaie comme une personne habituée à tout, qui trouvait cette rencontre naturelle et simple, en sa rouerie native et franche. Laurine apparut, et vint, plus sagement que de coutume, tendre son front à Georges, la présence de son père l'intimidant. Sa mère lui dit:

– Eh bien, tu ne l'appelles plus Bel-Ami, aujourd'hui.

Et l'enfant rougit, comme si on venait de commettre une grosse indiscrétion, de révéler une chose qu'on ne devait pas dire, de dévoiler un secret intime et un peu coupable de son cœur.

Quand les Forestier arrivèrent, on fut effrayé de l'état de Charles. Il avait maigri et pâli affreusement en une semaine et il toussait sans cesse. Il annonça d'ailleurs qu'ils partaient pour Cannes le jeudi suivant, sur l'ordre formel du médecin.

Ils se retirèrent de bonne heure, et Duroy dit en hochant la tête:

– Je crois qu'il file un bien mauvais coton. Il ne fera pas de vieux os.

Mme de Marelle affirma avec sérénité:

– Oh! il est perdu! En voilà un qui avait eu de la chance de trouver une femme comme la sienne.

Duroy demanda:

– Elle l'aide beaucoup?

– C'est-à-dire qu'elle fait tout. Elle est au courant de tout, elle connaît tout le monde sans avoir l'air de voir personne; elle obtient ce qu'elle veut, comme elle veut, et quand elle veut. Oh! elle est fine, adroite et intrigante comme aucune, celle-là. En voilà un trésor, pour un homme qui veut parvenir.

Georges reprit:

– Elle se remariera bien vite, sans doute?

Mme de Marelle répondit:

– Oui. Je ne serais même pas étonnée qu'elle eût en vue quelqu'un… un député… à moins que… qu'il ne veuille pas…, car… car…, il y aurait peut-être de gros obstacles… moraux… Enfin, voilà. Je ne sais rien.

M. de Marelle grommela avec une lente impatience:

– Tu laisses toujours soupçonner un tas de choses que je n'aime pas. Ne nous mêlons jamais des affaires des autres. Notre conscience nous suffit à gouverner. Ce devrait être une règle pour tout le monde.

Duroy se retira, le cœur troublé et l'esprit plein de vagues combinaisons.

Il alla le lendemain faire une visite aux Forestier et il les trouva terminant leurs bagages. Charles, étendu sur un canapé, exagérait la fatigue de sa respiration et répétait:

– Il y a un mois que je devrais être parti.

Puis il fit à Duroy une série de recommandations pour le journal, bien que tout fût réglé et convenu avec M. Walter.

Quand Georges s'en alla, il serra énergiquement les mains de son camarade:

– Eh bien, mon vieux, à bientôt!

Mais, comme Mme Forestier le reconduisait jusqu'à la porte, il lui dit vivement:

– Vous n'avez pas oublié notre pacte? Nous sommes des amis et des alliés, n'est-ce pas? Donc, si vous avez besoin de moi, en quoi que ce soit, n'hésitez point. Une dépêche ou une lettre et j'obéirai.

Elle murmura:

– Merci, je n'oublierai pas.

Et son œil aussi lui dit: «Merci», d'une façon plus profonde et plus douce.

Comme Duroy descendait l'escalier, il rencontra, montant à pas lents, M. de Vaudrec, qu'une fois déjà il avait vu chez elle. Le comte semblait triste – de ce départ, peut-être?

Voulant se montrer homme du monde, le journaliste le salua avec empressement.

L'autre lui rendit avec courtoisie, mais d'une manière un peu fière.

Le ménage Forestier partit le jeudi soir.


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